« À l’automne
2016, un groupe de programmeurs a organisé un concours de beauté mondial en
ligne, jugé par un système d’intelligence artificielle. L’idée était que l’ordinateur
serait capable d’analyser les photos envoyées par des milliers de participantes
du monde entier et d’identifier selon des critères objectifs les femmes
représentant la beauté idéale. Est-ce surprenant que, à une personne près, le
robot n’ait choisi que des reines de beauté blanches ? Les chercheurs
avaient “entraîné” la machine à partir d’une base d’images principalement
constituée de photos de femmes à la peau claire. “Bien que l’équipe n’ait pas
construit l’algorithme pour qu’il traite la peau blanche comme un signe de
beauté, écrit Sam Levin dans The Guardian,
les paramètres ont amené les robots-juges à tirer cette conclusion.” »
mercredi 21 novembre 2018
lundi 12 novembre 2018
George Packer, « Cheap Words », The New Yorker, 17-24 février 2014, disponible en ligne.
« The division [Amazon Studios] pursued an unusual way of producing television series, using its strength in data collection. Amazon invited writers to submit scripts on its Web site – “an open platform for content creators,” as Bill Carr, the vice-president for digital music and video, put it. Five thousand scripts poured in, and Amazon chose to develop fourteen into pilots. Last spring, Amazon put the pilots on its site, where customers could review them and answer a detailed questionnaire. (“Please rate the following aspects of this show: The humor, the characters…”) More than a million customers watched. Engineers also developed software, called Amazon Storyteller, which scriptwriters can use to create a “storyboard animatic” – a cartoon rendition of a script's plot – allowing pilots to be visualized without the expense of filming. The difficulty, according to Carr, is to “get the right feedback and the right data, and, of the many, many data points that I can collect from customers, which ones can tell you, "This is the one"?” »
mardi 26 juin 2018
Baptiste Rappin, Au régal du Management. Le Banquet des simulacres suivi de Fragments de l'inhabitation managériale, Nice, Ovadia, 2017, p. 77-78.
« Docilité, adaptation, domestication, comportementalisme… le
management développe une anthropologie qui réduit l’homme à l’animal ou à l’ordinateur :
dans les deux cas, le naturalisme informationnel amoindrit la conscience,
instance du jugement, pour favoriser la réaction immédiate à un stimulus.
Machine informationnelle, le Dasein n’est
plus le « là » de l’être et se meut dans un espace virtuel sans lieu.
La cage de fer est aujourd’hui en silicium.
La cybernétique, science du mitan du XXe siècle,
est le savoir du pilotage des organisations. Régime inédit d’une
gouvernementalité informationnelle qui opère à partir d’une modélisation fonctionnelle
du réel. Revanche des simulacres sur les formes, et naissance d’une tyrannie
douce, à visage humain, fondée sur le contrôle et l’auto-contrôle.
Aussi ne faut-il pas hésiter à voir, dans ce mépris de la
chair par le management et la gouvernance cybernétique, une forme actualisée de
gnosticisme et de haine du monde. »
vendredi 18 mai 2018
Jaime Semprun, Défense et illustration de la novlangue française, Paris, Éditions de l'Encyclopédie des Nuisances, 2005, p. 13-14.
« Selon
une anecdote bien connue rapportée par Racan, « quand on lui demandait son
avis de quelque mot français », Malherbe renvoyait aux « crocheteurs
du port au Foin » comme à ses maîtres pour le langage. De la même façon,
quand certains doutent que les transformations du français introduisent une
langue véritablement nouvelle, on peut les renvoyer à l’usage, tel qu’il
prévaut partout où la langue se forme plutôt au contact des « machines
intelligentes » qu’à celui des livres et de l’ancienne « culture
agricole ». Mais si la réalité de la mutation en cours est peu
contestable, il reste qu’il est bien sûr très difficile de décrire positivement
et d’analyser un idiome encore en gestation, dont les caractères spécifiques
apparaissent pour l’instant surtout en creux, pour ainsi dire, à travers ce que
son essor détruit des anciennes formes de la langue. La plupart de ceux qui
constatent le phénomène estiment d’ailleurs l’avoir suffisamment défini en
parlant d’appauvrissement, voire de déstructuration, de décomposition ou de
décadence. Cependant la simplification de son lexique et de sa syntaxe marque
bien plutôt la vitalité du français, sa compétitivité,
sa capacité de s’adapter aux nouvelles exigences de rapidité et de flexibilité, de mobilité et d’efficience, qui s’imposent à ceux qui le
parlent. Les qualités ainsi acquises par la langue ne sont autres que celles
qui deviennent toujours plus nécessaires à ses locuteurs, c’est-à-dire à nous tous ; car la « sphère
techno-marchande » n’est pas habitée par les seuls décideurs. En outre le français, tout en se simplifiant d’un côté,
s’enrichit de l’autre : l’usage de très nombreux nouveaux mots s’établit
avec celui de produits, de connaissances et de procédés techniques eux-mêmes
constamment renouvelés, ces nouveaux mots servent à forger toutes sortes de
tournures et d’images originales, et surtout l’allégement des anciennes
contraintes syntaxiques stimule l’invention de constructions inédites.
L’interchangeabilité toujours plus grande des divers éléments de la phrase, les
mots pouvant de plus en plus être employés comme verbes, noms, adjectifs ou
adverbes, permet, à partir d’un stock de mots limité, un nombre de combinaisons
presque infini. »
samedi 14 avril 2018
Timothy Aubry, Reading as Therapy: What Contemporary Fiction Does for Middle-Class Americans, Iowa City, University of Iowa Press, 2011.
« At the very least, the Amazon reviews demonstrate
that an awareness of the cultural and historical specificity embedded in a character’s
experience can coexist rather comfortably with cross-cultural identification
and feelings of shared humanity. Scholarly arguments frequently frame the two
perspectives as mutually exclusive, at times endorsing a version of identity politics
that scoffs at notions of universality, dismissing the ability of individuals
within a privileged demographic category to understand the experience of those
at the margins. And critics may be correct in asserting a contradiction or
tension between the urge to identify with characters and the urge to
acknowledge difference; but nonacademic readers are apparently able to manage
this contradiction, negotiating effortlessly, if sometimes unthinkingly,
between the two urges, each of which is necessary, I would argue, in different
circumstances to manage the complicated social challenges that a multiethnic
and globalized America produces. Perhaps responsible for readers’ untroubled
capacity to perform this particular oscillation is the manifestly affective
character of their interpretive experience – a state of responsiveness that can
eschew the logical imperative to decide between two incongruous perspectives. »
mardi 10 avril 2018
Trevor Pinch, « Book Reviewing for Amazon.com. How Socio-technical Systems Struggle to Make Less from More », in Barbara Czarniawska and Orvar Löfgren, Managing Overflow in Affluent Societies, New York, Routledge, 2012, p. 79.
« Reader
reviews also started to affect how publishers released books. J. K. Rowling’s
Harry Potter series, before becoming the international bestsellers whose
publication date was coordinated all over the world, were always published
first in the UK. When the second book in the series, Harry Potter and the Chamber of Secrets, came out in the UK months
before it appeared in the US, more than eighty rave reviews appeared at the US
Amazon site, including instructions on how to order the UK version with
delivery in less than eight days. »
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